Bonjour,
Je vous remercie pour vos messages sympathiques durant mon absence.
Voici deux photos anciennes prises à Viroinval. Je crois qu’elles datent de 1956. On y voit l’omnibus dans une composition traditionnelle pour l’époque d’ancienne voitures DRG à trois essieux, tractée par une Type 64 (ex P8 des KPEV, arrivée en Belgique en 1919 comme dommage de guerre).
Cela me fait penser à une vieille histoire que j’entendais raconter par mon père quand j’étais gamin. Jules Pestiaux, un gars du pays, était de service sur cette locomotive. En septembre 1944, il lui arriva une bien curieuse aventure. Enfin, curieuse avec le recul, parce que sur le moment… Cela ne l’avait pas du tout fait rire : il avait dû laisser son épouse et ses trois enfants pendant plus d’une année sans pratiquement aucune nouvelle.
Il avait été réquisitionné début septembre 1944 à la gare de Florinnes, en pleine débâcle allemande. Il avait été contraint à abandonner son petit omnibus pour mener une grosse KL 52 dont l’équipe allemande venait d’être dégommée par la résistance. Il avait dû se diriger vers le bois de Bainemounde pour accrocher quelques wagons disparates chargés de mystérieuses caisses. On saura après la guerre qu’il s’agissait de précieuses cages contenant les chauves-souris du Flapro développé dans le plus grand secret par la Luftwaffe. (Voir ici pour un complément d’info : Patine de mon matériel. Oui, j’ai osé !)
Son convoi, classé prioritaire, avait pris la route de l’est pour arriver après quelques jours et plusieurs mitraillages à Bamberg. Là, dans la cohue générale, personne n’avait pris en charge les wagons qui avaient été garés sur une voie de garage. Cette voie fut coupée du reste de la gare par le bombardement du 20 octobre 1944. Le convoi fut d’ailleurs retrouvé presque intact par les alliés en mai 1945. Les wagons et les précieux documents qu’ils contenaient seraient plus tard redirigés vers la Belgique par les services du commandant Henry. Quant aux animaux, ils avaient malheureusement tous péris.
C’est ainsi que notre malheureux Jules Pestiaux fut bloqué à Bamberg jusqu’en 1945 où il fut obligé de déblayer les décombres et de remettre en état les voies régulièrement endommagées par les terribles bombardements de fin de guerre.
Le gamin qu’on voit sur la pohto, c’est moi.
Pascal, From Happy Belgium