En vidéo : le train touristique du Haut-Quercy

En vidéo : le train touristique du Haut-Quercy

Episode 379 – En cette période estivale, je vous propose un reportage vidéo sur «le Truffadou», le chemin de fer touristique du Haut-Quercy (Lot). Trajet en rame tractée par la locomotive à vapeur 040 T 17.


L’association du Chemin de Fer Touristique du Haut-Quercy (CFTHQ) a été créée en 1991 et officialisée le 1er janvier 1992 dans le but de sauvegarder le tronçon de ligne entre Martel et Saint-Denis-près-Martel (Lot) sur l’ancien axe Bordeaux-Aurillac et préserver du matériel historique.

Photo 3170 : Préparation de la locomotive à vapeur 040 T 17 du chemin de fer touristique du Haut-Quercy en juin 2023 . Source : letraindemanu.fr

Surnommé «Le Truffadou», ce train transportait, au début du XXe siècle, les célèbres truffes du marché de Martel, remplaçant ainsi le transport fluvial par les gabares. Malheureusement, cette activité économique disparaît en 1928 en raison de maladies destructrices de l’outil de production. La région est également connue pour sa lavande.

L’histoire de la ligne

Le projet d’une liaison ferroviaire Bordeaux à Lyon via la vallée de la Dordogne fut initié par le conseil municipal de Bergerac en 1852. Cette idée de transversale fut retenue par Périgueux. Une première concession de 1862 est attribuée à Monsieur Rougemeont de Lowenberg, mais la compagnie fait faillite et est reprise par la Compagnie du Paris-Orléans l’année suivante avec un prolongement, depuis Bergerac, jusqu’au Buisson de Cabans, assurant ainsi une liaison entre les lignes Paris-Bordeaux et Paris-Agen.

La construction de la ligne est topographiquement compliquée car elle nécessite de nombreux ouvrages d’art. C’est en 1875 qu’est proclamé le projet de jonction entre Le Buisson et Saint-Denis-lès-Martel. Les études débutent en 1876 et le trajet définitif est approuvé l’année suivante.

La mise en service se fera par tronçons : Juillet 1882 pour la section Siorac (Pk 141) / Sarlat (Pk 167) , août 1884 pour la tranche Sarlat (Pk 167) / Couzalès (Pk 190) et juin 1889 pour le tronçon Couzalès (Pk 190) / Souillac (Pk 195) / Saint-Denis-près-Martel (Pk 214, Martel étant au Pk 208) et enfin mai 1891 pour la section Saint-Denis-près-Martel (Pk 214) / Viescamps (Pk 276) / Aurillac (Pk 290).

letraindemanu (3171) la halte des courtils source donnat dominique

Photo 3171 :Ancienne maison de garde-voie devenue halte des Courtils. Source : Dominique Donnat

La construction de la ligne s’est faite sur fond de révolte sociale, les opposants étant principalement les propriétaires terriens pourtant bien indemnisés, qui voyaient leurs propriété morcelées, et les acteurs économiques des gabares qui voyaient dans ce nouveau transport ferroviaire un concurrent à leur activité professionnelle. Cette révolte sociale fût rude avec des actions de destruction, parfois à l’explosif. Raison pour laquelle la ligne est encore parsemée de maisons de garde-voie. Ces gardes, armés de sabres, arpentaient la ligne jour et nuit.

Lors de la Grande Guerre, la voie est déferrée en 1917 et les rails envoyés sur le front du nord-est pour la construction d’une ligne d’approvisionnement des forces américaines. Après le conflit, la ligne est reconstruite avec du rail américain (ARAB, American Rail Army série B), encore en place aujourd’hui.

Photo 3172 : Au-dessus du perré vers 1944. Source : La Gazette du train de Martel, N° 01, 2023

Lors du Deuxième Conflit Mondial, la ligne subit de nombreux sabotages de la Résistance française pour empêcher les Allemands de remonter vers la Normandie. Puis, tous les trains Paris / Toulouse utilisèrent à nouveau la section Saint-Denis / Martel pendant plus de deux ans, à raison de 40 à 50 trains quotidiens. Les trains les plus lourds nécessitaient une traction multiple avec parfois des locomotives en pousse, la pente étant de 20/1000.

Photo 3173: Dernier passage de l’autorail SNCF à Mirandole en 1980. Source : La Gazette du train de Martel, N° 01, 2023

La ligne est fermée le 31 mai 1980 et le tronçon déclassé le 5 juin 1992.

L’association

Née d’une poignée de bénévoles menés par Philippe Coudeville, ingénieur des Mines, et Hervé Lacarrière, propriétaire terrien, l’association est lancée en 1991 et est officialisée au Journal Officiel du 1er janvier 1992. Elle a pour objet «la conservation et la défense du patrimoine ferroviaire, notamment la remise en activité, la conservation et l’exploitation d’installations et de matériels ferroviaires».

Photo 3174 : Enseigne du Chemin de Fer Touristique du Haut-Quercy devant l’ancienne halle à marchandises devenue bâtiment voyageurs de la compagnie. Juin 2023. Source : letraindemanu.fr

De longues démarches administratives aboutissent à l’acquisition de 8km de voie, entre Martel et Saint-Denis-près-Martel en 1997. Entre-temps, il aura fallu plusieurs années de travail commun pour remettre la voie en état, vérifier les ouvrages et débroussailler l’abondante végétation qui avait repris ses droits. L’association en exploite 6,5km et lance sa première saison touristique. Elle accueille 6000 passagers cette première année.

Au fil des ans l’association a posé de nouvelles voies en gare de Martel pour étoffer sa capacité de parcage, a agrandi son atelier et modernisé sa gare voyageurs (aménagée dans l’ancienne halle marchandises) et a aménagé l’autre extrémité de la ligne pour permettre le croisement des rames et la remise en tête des locomotives. Tout au long de l’année, elle entretient ce patrimoine afin de garantir la sécurité de ses visiteurs et de ses personnels.

Photo 3175 : Chemin de Fer Touristique du Haut-Quercy , sur le viaduc des Scourtils, une rame tractée par la locomotive à vapeur 040 T 17. Juin 2023. Source : letraindemanu.fr

Trente ans plus tard, la compagnie accueille 100 000 passagers/an, emploie six permanents et plus d’une dizaine de saisonniers qui épaulent les bénévoles.

Le patrimoine de l’association

L’association possède un patrimoine bâtimentaire (BV, atelier, poste d’aiguillage,…), un parc roulant et plusieurs engins importants. Parmi le matériel roulant, on peut citer :

• 030 T Ferrum TKh 5703 baptisée «Marine».

Construite en 1961 par les ateliers de Chrzanov (Pologne). Achetée en Pologne en 1999, elle a nécessité 3000 heures de restauration. Puissance de 600 cv, masse de 45T, vitesse maxi de 60 km/h.
Apte au service voyageurs, elle assure la seconde rame touristique en haute saison.

Photo 3176 : Chemin de Fer Touristique du Haut-Quercy la locomotive à vapeur 030 T Ferrum TKh 5703 baptisée «Marine». Juin 2023. Source : letraindemanu.fr

• 150 Z 3661 (ex Br 50 de la DB)

Ceux qui me lisent régulièrement sur ces pages le savent : je suis particulièrement friand de ce modèle de locomotive.
Construite en 1938 par le IIIe Reich, anciennement affectée au dépôt de Berlin. Achetée en 2007. Puissance 1800 cv, masse de 150 t en ordre de marche, 23 m de long.
Aujourd’hui restaurée, elle est exposée en statique face au BV.

Photo 3177 : Chemin de Fer Touristique du Haut-Quercy la locomotive à vapeur 150 Z 3661 ex-Br50 de la DB. Juin 2023. Source : letraindemanu.fr

• 030 n°4 baptisée «Trambouze»

Construite sur un modèle de 1891 pour la Société des Chemins de fer de Cours à Saint-Victor (Rhône), elle fût la dernière d’une série de quatre locomotives. Son nom de baptême vient du nom de la rivière traversant Cours. Puissance de 300 cv, masse de 26t, vitesse maxi 40km/h. Radiée en 1961, rachetée par Monsieur Bras, un amoureux collectionneur à Espalion, elle rejoint le CFTHQ en 2008. Restaurée, elle est exposée en statique sur le quai de la gare et sa cabine de conduite est accessible aux visiteurs.

Photo 3178 : Chemin de Fer Touristique du Haut-Quercy la locomotive à vapeur 030 n°4 baptisée «Trambouze». Juin 2023. Source : letraindemanu.fr

• 040 T 17

Locomotive utilisée pour la rame touristique le jour de mon reportage vidéo (ci-dessous).
Construite en 1927 par la Société Alsacienne de Constructions mécaniques (SACM). Etait affectée aux Cokeries de la Silardière dans la Loire. Achetée en 2010 par le CFTHQ, elle a été restaurée et mise en service en 2011. Elle assure un service régulier les jours de circulations à vapeur.

• BB 63500

Visible dans le reportage vidéo. Construite en 1965 par Brissonneau et Lotz pour la SNCF. Moteur SACM. Puissance 825 cv, masse 68,3 t, vitesse maxi 80 Km/h.
Opérationnelle, elle assure tous les services sur la ligne.

L’association compte également

– Une 040 SLAK en cours de rénovation à l’atelier (visible dans la vidéo) et qui devrait être opérationnelle courant 2024 ;
– des draisines pour ses travaux d’entretien, dont l’une est affectée au train de lutte contre les incendies en période estivale ;
– deux rames de baladeuses construites par l’association sur la base de wagons plats K50 ;
– un ensemble bi-caisse Z 4100 dont une voiture pilote ;
– un locotracteur Y 5137 ;
– une locomotive V 36 ;
– Un autorail Picasso X 3968 ;
– Des voitures TEE (dont certaines pièces ont été utilisées pour l’aménagement intérieur du BV (Bar) ;
– Une voiture Talbot ;
– Des engins de chantier pour l’entretien et la rénovation des voies.

Une visite à ne pas manquer

Si vous passez dans cette belle région, il est indispensable de visiter ce site. Le spectacle est assez époustouflant.
Pour bien préparer votre visite, il y a lieu de vérifier les dates et horaires sur le site officiel de l’association. Certaines circulations sont en traction vapeur, d’autres en traction diesel.
Vous pouvez réserver votre billet en ligne. Dans tous les cas, il y a lieu de se présenter face au BV entre 45 et 60 mn avant l’heure de départ, surtout si vous n’avez pas de réservation.
Le train est accessible aux usagers en fauteuil roulant.
Personnes souffrant de problèmes respiratoires : Au trajet aller, aucun souci, la locomotive est en pousse. Au trajet retour (locomotive en traction), il est préférable de vous placer juste derrière la locomotive : c’est là que vous serez le moins exposé aux fumées dans les tunnels.
Les chiens tenus en laisse sont acceptés.
Bar et toilettes.

Pour tout contact par mail, n’utilisez pas la fiche contact du site, mais directement le mail de l’association :
Près la Gare 46600 Martel
+33 (0)5 65 37 35 81
[email protected]

Conseils pour les prises de vues

Si vous êtes en groupe, il est préférable qu’une personne dédiée enregistre la bande son intégrale de la visite au voyage aller sur un enregistreur vocal et du même point (une trentaine de minutes environ), ainsi celui qui filme les prises de vues n’aura pas à s’occuper de la bande son. Cela facilitera votre montage ensuite.
La meilleure place pour filmer au trajet aller est en tête de rame à côté de la cabine de la voiture pilote. Une place très prisée !
Les décors les plus importants (Vallée de la Dordogne) sont à droite au trajet aller.
Plusieurs arrêts à l’aller et au retour permettent des prises de vues de l’engin de traction.
Pour les prises de vues du train en latéral, une petite perche peut être utile pour éviter les autres photographes dans votre champ. Attention toutefois au gabarit des tunnels et à la végétation !

Je tiens à remercier les personnels de l’association pour l’accueil qu’ils m’ont réservé. Je tiens aussi à remercier Jean-Pierre Grellier, amoureux des trains et vidéaste télé pilote de drone (Droneways.fr) qui m’a autorisé à utiliser quelques extraits de ses images. Vous trouverez sur son site de nombreux superbes reportages sur des trains touristiques. Ci-dessous son reportage sur le CFTHQ tourné en 2018.

Emmanuel
Cet article est extrait du fil Le nouveau réseau de la CIC - #311 par Manu93


A lire également

Ligne de Sarlat à Souillac et Aurillac en 1951, par Guy Desnues, Revue de l’Association Française des Amis du Chemin de Fer (AFAC) n° 166, janvier-février 1951.

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Bonsoir Manu,

A la vue du coffrage devant la cheminée, il me semble que la BR 050 est une ex Deutsche Reichbahn, ce que l’on appelle couramment une “Reko” car machine reconstruite (ou améliorée)

“Reko” comme reconditionnées ?

En fait, je ne connais pas la signification exacte de “Reko”.
Par contre, à la DR, cela était assorti d’un changement de chaudière dans un acier plus résistant.

Merci du beau reportage, cela ramène à ma memoire la journée avec mon ami cadurcien Jean, bénévole sur le Quercyrail, maintenant fermé depuis longtemps.
C’était en 2003…

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Merci pour cette video que je découvre seulement aujourd’hui.
J’ai, bien sur, fait le voyage Martel Saint Denis plusieurs fois avec des invités qui ont été toujoujours enchantés.
Alain.
PS Je trouve que cette video est très pro.
Bravo ‘Le train de Manu’

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Bonjour,

@ Claudio51, Quercyrail, ce n’était pas sur la même ligne, cela circulait entre Cahors et Capdénac via Cajarc. Depuis, cela a été transformé en piste verte sur la première section.
J’avais fait cette ligne à 2 reprises, une fois avec des copains avec qui nous avions affrété la RGP sur Cahors - Cajarc, une autre fois en Caravelle depuis Capdénac.

La ligne du Chemin de Fer Touristique du Haut Quercy (CFTHQ) se trouve quant à elle sur l’ancienne section Souillac - St Denis près Martel. J’ai fait cette ligne en 2010 et - à l’époque - les dirigeants de ce CFT avaient pour projet de faire un vélorail sur la section ouest entre Martel et l’ancienne gare de Le Pigeon. Mais les propriétaires de l’ancienne gare de Martel faisaient obstacle à ce projet donc aujourd’hui je ne sais pas où il en est.

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Merci pour ton appréciation. Mais, comme il faut savoir faire son auto-critique, j’ai encore fait trop long. C’est le problème majeur : savoir être concis. Pas facile, il y a tant à montrer.
Par la suite, faut que je me trouve un bon micro pour améliorer la voix de narration.

Merci Bertrand, tu as bien sûr raison.
On était de passage, ma femme et moi, à Cahors et j’avais donc cherché mon ami au téléphone pour se revoir. Comme ce dimanche là il était en service sur la ligne il me donna rendez vous à Capdenac et on se retrouva au petit restaurant près de la gare avec tous les bénévoles du Quercyrail en service.
Comme on était italiens on se trova au centre des discours et ce fut très très agréable.
Si je me rappelle bien il n’y avait que des autorails, on m’invita voir le poste de conduite du Picasso et je fus fort étonné de voir la position a 90 degrés par rapport à la direction de marche.
J’ avais récemment vu en ligne une sorte de comité pour la reprise du Quercyrail mais comme tu dis qu’il y a une piste verte, je crois que ce soit définitivement fini.
Bon fin de semaine du lac de Como.
Claudio

Non. C’est pas trop long.La technique actuelle permet de se passer des moments que l’on juge sans intérèt. Mais, par contre, on ne peut pas donner de l’intérèt.
Ce que j’ai trouvé ‘PRO’ c’est la mise en oeuvre du titrage et l’évocation du contexte économique et social dans la création de la ligne.
Voilà, je dis encore Bravo.

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